La suite

.

tel que je le vois

le monde n’existe pas

.

celui d’après non plus d’ailleurs

et sait-on vraiment ce qu’est la vie

d’avant

.

en surface

par intermittence

des choses reviennent mais

les mots majorés jamais ne remédient

au jour premier

Robert Vincent

Ce qui revient

.

.

par la masse

de mots projetés

ou de cet œil

sans cesse qui revient

en arrière

je nourris aussi

la béance du regret

chapé de silence

et sans le vouloir

du même bois

et de pareille tendresse

vois

je suis dans

ton pas

Fernand Michel

Sole mio

.

Mes pieds

glissent

océan

agapes

la-haut, ils

les bons hommes

érigent des montagnes

c’est l’heure de sable

ça sent le parfait

jusque dans le ciel

il est temps de

poser mes falaises

au rythme

«  Un deux – moins vite,

vois commes ça chaloupe »

des vagues

.

Anne-Laure Lussou

Can Dagarslani

(de) Ici n’est plus très loin

.

Plage poussière

de soleils 

          unanimes

.

(égrénée

perd son compte

dans le découlement d’une identique l’autre

chaque fois différent)

.

Entre ses marbres

Infimes

         suivent

des abimes de temps

.

Danièle Faugeras

Satoshi Morita

Présence

.

ta voix

là où les choses ne peuvent s’extraire

de mon regard

elles me dépouillent

font de moi une barque sur un fleuve de pierres

si ce n’est ta voix

pluie seule dans mon silence de fièvres

tu me détaches les yeux

et s’il te plaît

que tu me parles

toujours

.

Alejandra Pizarnik

Francesca Woodman

Oyonnax

.

caresser

de l’index la peau du pavé

jusqu’à voir la terre

ciller

lentement suivre

le geste une fois ou deux

sans l’à-coup pour

ne pas casser l’immeuble

les jardins ouvriers

ni ces rues ceintrées où lorgne

l’esprit du passé

Paul End

Profils

.

ces visages

qui sourdent de sous le verre

ont-ils un fond de vérité

du creux

des regards ou des rires fous

qui s’apostent au miroir

quelque soit l’heure

la lumière ou la couleur

l’œil ne s’attarde jamais

assez

Can Dağarslanı

(de) Le soir

.

La porte entrouverte,

L’odeur des tilleuls…

Oubliés sur la table,

Un gant, une cravache.

.

Le jaune de la lampe…

J’écoute tous les bruits

Pourquoi es-tu parti ?

Je ne comprends pas…

.

Le matin bientôt

Sera soyeux et clair.

Que cette vie est belle,

Sois sage, mon cœur.

.

Toi qui semble las.

Ce battement trop sourd…

Je l’ai lu, tu sais :

Jamais l’âme ne meurt.

.

Anna Akhmatova

Egon Schiele

Vingt-quatre heures l’été 

.

On touche on cherche y a-t-il jamais

eu autre chose que ce suspens

comme entre deux et quatre la rue

l’été c’était l’enfance le jaune

de la maison d’en face on répète

les mêmes mots les mêmes images

comme s’ils gardaient un peu de corps

et qu’on était resté là toujours

le front contre le froid de la vitre

.

Jacques Ancet

Martin Parr

Volée d’anges

.

jaunes et

rouges et bleus avec des cris

et des pistolets et

qui vont infatigables de coins sombres

en buissons creux – je me souviens des ailes que

je portais à leur âge ; elles étaient douces et blanches

et j’ai longtemps fui l’envie de les remiser –

pour ne pas mourir dans

une chambre

Minnie Evans