.
déterre-moi
dit à l’œil
le reflet
.
mais l’œil
ne voit en face
ni le baiser désert
.
ni la mort de l’obscur
gelé
dans le volume faux
.
qui se tutoie
en l’air
sa langue y perd
.
car le tu
est sous la peau
la profondeur
.
Antoine Emaz

dès l’instant
où le vase a cédé
je n’ai pas pu
hurler –
j’avais si peur
de me réveiller

Emily Graham
.
Et si tu écrivais la chambre des ombres
entendrais-tu
la voix que menace
son propre écho, un murmure dressé
contre le silence
s’engouffre dans la nuit
et s’étonne du vent qui écorche
la fenêtre, entendrais-tu
tes mots au bout de l’aube
si tu écrivais
ce qui brûle en toi ?
La voix halète, étouffe presque
la parole sans écho, l’amour
sans amour, le désordre
planté dans le temps
qui s’obstine jusqu’à demain.
Hélène Dorion
Doux nuages, douces collines et doux lac
mais toi, visage
pour ta beauté n’ont suffi l’harmonie
la clarté
et l’accord qu’entre elles
ont ces choses déjà
Humain regard
Qui s’est posé
et sans vouloir
et ne sais taire
Regarde où tous, nous,
sommes cachés – et dis son nom ;
autre est ta beauté :
et ainsi
sans savoir à l’instant nous rendras
la mémoire où s’assemblent d’eux-mêmes
les instants
de douceur qui ne donnent en vain
Gérard Bayo
tu penches la tête et passes la porte : au-delà du seuil, le monde respire
de visions, une onde impatiente qui charrie les odeurs des maisons,
humidité, rouille, cendre, essence, âges qui tournent au brun
les yeux survolent les têtes penchées sur les tables, la main sur le téléphone
on s’arrête au bar dans la matinée, le froid chante, la peau
reflète l’absence de geste
des caillots de lumière deviennent formes d’un doux sourire
enfoui
un jour
sans cause
sans nom
la porte cède
l’hiver entre
d’un seul coup
l’air tranche
la chambre se retire
le corps se blottit
contre sa propre épaule
plus rien ne tient
on est
ce qui reste quand
tout se tait
Hachuré, le jour :
haché.
Pourtant s’infiltre,
Rebelle, éraflé.
La lumière du jour.
Lourdement pèse,
Plurielle,
Non encore levée,
La herse de l’ombre
Pierre Chappuis