Amours en chemin

.

honni

du lieu de l’habitude

le corps erre sans relâche

avec le récit du jour d’avant

aussi des visages

à l’envers

insensiblement

qui perdent la lumière

et des ombres dans

le couchant

Hervey Stein

Lésion

.

La couleur afflue à cet endroit, rouge morne.

Tout le reste du corps est sans tache,

Couleur perle

.

C’est dans une cavité de roc

Que la mer vient aspirer,

Un seul creux suffit à la concentrer tout entière.

.

De la taille d’une mouche

La marque du destin

Rampe le long de la paroi.

.

Le cœur se ferme,

La mer se retire,

Les miroirs sont voilés.

.

Sylvia Plath

Morton Bartlett

(de) Nature morte

.

Arbre. Ombre. Terre

sous l’ombre pour les racines.

Monogrammes enlacés.

Argile. Rangée de pierre.

.

Racines. Leurs entrelacs.

Pierre dont le propre poids

arrive à libérer de

tout ce système de nœuds.

.

Elle ne bouge pas. Impossible

De la déplacer, de l’emporter.

Ombre. Homme dans l’ombre,

comme un poisson dans la nasse.

.

Joseph Brodski

Robert Darch

(de) Les signes sont là

.

Il me faut une assise

peu importe dans quel élément

Si je pouvais trouver en l’homme

la fibre à laquelle m’agripper

Si ma tête

était moins lourde à porter

Si le verre

aidait vraiment à oublier

Si l’amour

S’avérait enfin prophétique

.

Et si la seule assise

n’était que dans le si…

.

Abdellatif LAABI

George Byrne

De nouveau en 90

.

Ai rêvé que j’ai fait deux cent kilomètres pour rien.

Lorsque tout a grandi. Des moineaux gros comme

des poules

qui chantaient à vous crever les tympans.

Ai rêvé que je dessinais les touches d’un piano

sur la table de la cuisine. Sur lesquelles je jouais, en

silence.

Les voisins entraient pour m’écouter.

.

Thomas Transtromer

Makoto Fukui

La pluie

.

Sa vieille

Âme

Grégaire


Chaque

Goutte

Tombée

Est la masse

D’une autre

Est l’abîme

D’une autre

Comme un miroir

Se regardant

A l’infini

.

Gilbert Trolliet

Skurktur

(de) Beaupré

.

je ne sais pas

ce qui m’aurait vraiment aidée

assise (et toujours je t’attends) on s’est dit

ces choses

qu’on oublie

ce n’est déjà plus rien

et moi seule au jardin

qui n’ai fait que t’attendre

.

Eric Sautou

Sarah Jarrett

Écoute

.

je vole dans les nuits

les roses de ta bouche,

afin qu’aucune femelle ne puisse y boire.

Celle qui t’enlace

me dépouille de mes frissons,

ceux que j’avais peint sur tes membres.

je suis la bordure de route

qui t’effleure,

te jette à terre.

Sens-tu ma vie autour

partout

comme un bord lointain ?

.

Else Lasker-Schüle

(Traduction d’Alain Suied)

Armineh Hovanesian

Signe de quoi

.

d’un geste

à s’y méprendre

comme si le doigt écartait

la ronce qui menace le visage

l’œil à peine ouvert

et la tête sous une épaule

tu cherches le mot qu’

il te manque

Robert Van der Hils

(de) La moitié du geste

.

déterre-moi

dit à l’œil

le reflet

.

mais l’œil

ne voit en face 

ni le baiser désert

.

ni la mort de l’obscur

gelé

dans le volume faux

.

qui se tutoie

en l’air

sa langue y perd

.

car le tu

est sous la peau

la profondeur

.

Antoine Emaz

Philipp Schopke