Sans titre


Et les nuages sont longs

ta langue sans prière


en cet instant illuminé

les feuilles repliées à peine

visibles et vertes

le vent agite tout ce qui bouge

vibre sur tout ce qui est


tu n’attends pas de réponse

dans ta poitrine ouverte

le soleil s’est logé entier


Noée Maire

Claire Dias Lachèse

Traverser l’instant


un chat

inconscient

du poids des heures –

pas Kawamura

un autre

s’étire sur le seuil de porte

je lui envie son silence

sa grâce

il sait

moi j’apprends

le vent chasse le gris

les feuilles mortes jonchent le sol

peut-être savent-elles

elles-aussi

Kono Bairei

Terrain vague


c’est un espace

sans bord

sans fin

où des poignées de mots instables

jonchent le sol

un chemin de pas

hésitant

serpente entre l’oubli

et la joie

la lumière y est douce

le vent léger chasse au loin

les ombres

le sais-tu ?

suspendu à l’élan

je pourrais à jamais

vivre là

Olivier Debré

Ce qu’il en reste



ces oiseaux

aux ailes trop larges

laissent derrière eux

des plumes noires

d’effroi

ils nous effleurent

en silence

leurs ombres légères

glissent sur nos fronts

et au matin

dans un ciel lavé

de toute empreinte

on goute alors

au frisson –

ont-ils seulement

existé

Davis Hurn

Le café espagnol


Une halte

est-elle si souvent

recherche.

Pauvre. Dévastée. Ruelle.

En larges lettres cramoisies

déteintes

vous aviez peint au-dessus du vantail

« Cantar hacia afuera

o adentro »

Je cherchais une halte.

Je suis rentrée dans le café espagnol.

« chanter en dehors

ou en dedans » ;

Lorsqu’ils fouilleront ma voix

ils trouveront la nuit

un lys blanc

si pâle

qu’il semble larmes.


Nicole Drano

Alexej Von Jawlensky

Amas


alors

je tourne les yeux

vers l’horizon

assez haut

pour y trouver encore

un souffle

ô rien de grandiose

rien qui brûle

juste l’amorce

d’un chemin

fragile

une trouée

peut-être

au creux des pierres

empilées

Alberto Giacometti

Je la vois


dans un songe

à peine

une poire

longue bleue

immobile presque

tourne autour d’un soleil

sans feu

tout au-dedans semble

vibrer – des voix peut-être

je ne ris pas

je regarde

ce fruit suspendu

quelqu’un l’a mis là

je ne sais

ni quand

ni comment

nous sortir

de cette image

Caroline Dufour

Refonte


Au pied

de ton immeuble,

des amas

de neige.


Au fond

de ton crâne,

des flocons

d’autres froids,


de purs cristaux de joie.


Maintenant,

tes yeux flambent,

collés à la fenêtre

et la neige fond

en chaque

lettre


du prochain poème à naitre


Morgan Riets

Herman Brood

Jusqu’où dénouer ? (8/8)

assis

sur une chaise

immobile

le verbe usé

à force de rien – ce rien creux

sans fond

j’attends

que le silence me caresse le crâne –

aimer attendre ne sont qu’un seul geste

de l’autre côté d’un mur

une voix rit

je ferme les yeux

la femme que j’aime

n’est pas

ou n’a jamais été

peut-être

Tessa Traeger

Jusqu’où dénouer ? (7/8)



maintenant

je cherche un nom

à rebours

il flotte

entre deux silences

opaque

comme un linge

dans le vent

la main écrit toujours –

quelque chose

du pardon

cherche le passage

Bertrand Delai