nous dormons
sous mes paupières
nous marchons
sous les ailes du vent
nous effleurons
les buées d’automne
nous suivons
l’eau qui coule de nos mains
nous allons
plus loin que loin
nos yeux découvrent
la beauté du matin

nous dormons
sous mes paupières
nous marchons
sous les ailes du vent
nous effleurons
les buées d’automne
nous suivons
l’eau qui coule de nos mains
nous allons
plus loin que loin
nos yeux découvrent
la beauté du matin

ce mot
sans bord ni creux
ne dirait pas le nom des choses
il serait un passage
et sans même ouvrir les yeux
tu saurais qu’il reste
quelque chose de sain et sauf
tu lancerais alors
dans un souffle à peine –
je n’efface rien
j’habite en moi

je cherche
un mot –
poreux peut-être
qui ne nierait ni la nuit
ni les murs lézardés
ni les corps encore tremblants
d’avoir aimé
ce mot serait un tesson tiède
dans la paume ouverte
il pourrait
garder la beauté de ce qui fut
sans jamais rien
commettre

je te vois
face à l’eau
le dos droit
comme un refus
tu ne dis rien
et j’aime tant
ce rien-là
les arbres passent
lentement
sur le chemin
la pluie
n’a plus besoin
d’excuses
dans chaque silence
je cherche le mot
que tu retiens

la main effleure
la poussière des ombres
aussitôt
quelque chose cède
s’efface
au moment d’apparaître
la main insiste
palpe le vide
une brèche s’ouvre
et sur la page
tremblant
un visage nait
déjà prêt à se fendre

la rue silencieuse
traversée
de quelques fenêtres allumées
et dans l’arrière-cour
immobile
la neige
sans bruit qui recouvre les choses
est-ce mon regard qui suit ton pas
ou l’hiver
doucement qui vient
te chercher

dans un songe
à peine
une poire
longue bleue
immobile presque
tourne autour d’un soleil
sans feu
tout au-dedans semble
vibrer – des voix peut-être
je ne ris pas
je regarde
ce fruit suspendu
quelqu’un l’a mis là
je ne sais
ni quand
ni comment
nous sortir
de cette image

DANS L’ERRANCE
l’œil troublé
j’implore
un signe
un geste
un reste de souflle
quelque chose pour te figurer
car dans ce qui reste –
vois-tu
tu n’as qu’un âge
tu souris
et tu ne portes jamais
d’ombre
