Sortilège



incassable est

le récit

où je m’enferme

chaque soir

un peu plus

pluie

poussière

un fil de lumière

léger

quelques mots

seulement –

juste assez

pour que mes yeux

dans l’eau

baignent

Jason Decaires

La vérité vraie



une arche

le vent

un ciel menaçant

le ciel se penche

l’arche se fissure

et de l’ombre

surgit un regard rieur

presque insolent

après

je ne peux ni aller

ni venir

mes os claquent

dans un silence de mort

j’attends –

la vie est un rêve

dont je ne prends pas

soin

SMITH

Les deux empires


Je ferme à demi les yeux

je tends une main

et je divise

d’un coté

il y a l’empire

de la fenêtre

de l’autre

l’empire

de la porte

de même le pape

après la découverte

de l’Amérique

a partagé le continent

entre Espagnols

et Portugais

mais je ne suis pas

le pape

je suis

qu’un pauvre type qui est seul

et regarde.


Alberto Moravia

Jean Munoz

(de) Creuser la nuit


Creuser

– seule loi, pour qui encor s’obstine

à désirer : l’espace autour de nous

a fondu, là-bas n’est plus

qu’au-dedans – seul

labyrinthe


Sylviane Dupuis

SMITH

(de) Tournoiements


seule avec toi

dans le silence vert

je respirerai au plus léger

l’invisible

Du fond des eaux frémira la lumière

Je te retrouverai


Roselyne Sibille

Trente Park

Circonstances – 1


le réverbère

froissant l’asphalte

la nuit hésite

à tomber

je sens tes doigts serrer

mon poignet

tu dis –

il faudrait voir

au creux des visages

ce que la lumière échoue

à faire exister

Jean Fautrier

(de) Poèmes du temps retrouvé


Une fois pour toutes

Tu as nommé

Le monde où je dois vivre

Chaque chose

Est signe

Avant d’être chair

L’arbre le blé

La vigne

Le sang des terres

M’emporte

Tu fus ma naissance

En toi

Ma mort aura lieu

J’écoute

Venir ta vie


Hélène Cadou

Ana Vallejo

Cendres (7/9)


AU BOUT DE LA ROUTE

une langue de sable

cerclée

d’une ville assoupie

joues fraiches

l’œil rond –

dans le mouton blanc

des vagues

je vois

le dessus de ton crâne

qui flotte

comme une bouée –

ce qui n’a pas été

est l’objet-même

du souvenir

Claire Dias Lachèse

(de) Langue de chien


CES heures, sentiers noirs,

pendant lesquelles tu dors,

ces heures d’épines – tu dors,

tu dors – où, sentiers noirs,

sonnée, piquée, brûlée,

là –

j’entends tout.


Pendant ces heures où –

chardons sauvages

suis griffée, piquée

je me lève d’un bond,

sentiers boueux pendant que tu dors,

je crains, je cours –

j’entends Tout.


Dominique Maurizi

Jamie Campbell

Entre nous


amour

présent

sans être

à force d’envisager

entre nous

maintenant

ce désert bleu

sans fin

et ma voix –

ombre à peine

d’une longue

enjambée

Pavle Nicolik